Vœux de Nouvel An : « Pour une Armée apolitique, épine dorsale d’une solide démocratie ». Mathias OTOUNGA OSSIBADJOUO

Lors de la réception des vœux des Forces de Défense et de Sécurité le 29 janvier 2016, le ministre de la Défense nationale, Mathias OTOUNGA OSSIBADJOUO a, dans son allocution ci-dessous, sommé pour une armée véritablement apolitique, épine dorsale d’une solide démocratie.


Monsieur le Ministre d'Etat,

Messieurs les Ministres,

Monsieur le Secrétaire Général du Ministère de la Défense Nationale,

Monsieur le Chef d'Etat-major Général des Armées,

Monsieur le Commandant en Chef de la Gendarmerie Nationale,

Monsieur le Commandant en Chef de la Garde Républicaine,

Monsieur le Directeur Général du Service de Santé Militaire,

Monsieur le Directeur Général du Génie Militaire,

Messieurs les Chefs de Corps,

Officiers Généraux, Officiers Supérieurs, Officiers subalternes, Sous-officiers, hommes du rang,

Distingués invités,

Mesdames et Messieurs,

Je voudrais tout d’abord vous remercier, particulièrement mes collègues Membres du Gouvernement et nos distingués invités, pour votre présence parmi nous, en cette  période toujours très chargée.

Je voudrais ensuite remercier les différentes personnalités Militaires, pour les bons vœux adressés à mon épouse, à ma famille et à ma modeste personne.

C’est un symbole fort que le Chef Suprême des Armées nous ai autorisés à renouer avec la traditionnelle cérémonie de présentation des vœux. C’est un symbole fort de son attachement à ce que le Gabon assure sa propre défense et qu’il progresse vers sa nouvelle ambition : devenir un pays émergent à l’orée 2025.

C’est donc vraiment un symbole fort que nous soyons réunis ici, pour célébrer la nouvelle année.

Mesdames et Messieurs,

Pour que le Ministère de la Défense, sentinelle de la Nation, demeure pleinement mobilisé au sein de l’action collective de l’Etat, conduite par SE Ali BONGO ONDIMBA, Président de la République, Chef de l’Etat, Chef Suprême des Forces de Défense e et de Sécurité, la place du ministre de la Défense est au sein des forces, au plus près de ses soldats. Etre tous réunis  au Camp Baraka, en ces lieux mythiques, profondément attachés au destin du Gabon constitue un autre symbole fort.

Cela fait quatre mois que je suis avec vous, et je voudrais vous faire une confidence : je suis un homme heureux, un homme très heureux.

Heureux, non pas pour le prestige et les honneurs que la charge procurent. Je n’y suis d’ailleurs que peu sensible de nature.

Heureux, non pas parce que la Défense est une fonction stratégique de l’Etat, une fonction qui assure la souveraineté, l’indépendance, voire l’existence même de notre nation.

Heureux, non pas parce qu’être ministre de la Défense, c’est veiller avec beaucoup de précaution sur un dispositif technologique et humain. Fer de lance de la Nation.

Je suis un homme heureux, parce que j’ai la charge d’hommes et de femmes formidables : compétents, disponibles, fiers de servir leur pays, courageux au péril de leur vie. Nous Gabonais qui cherchons souvent des références, des exemples ; les exemples sont là autour de nous. Ce sont nos soldats, qui savent que la vie, la citoyenneté est faite de droits, mais aussi de devoirs.

J’étais avec le Président de la République Minkébé, après la RCA. J’y ai vu des femmes et des hommes heureux, fiers de ce qu’ils font, tout simplement bien dans leur tête. Quand on voit  une poignée de militaires vivant dans des conditions extrêmement rustiques, dans l’eau et la boue à la saison des pluies ou dans la poussière et la chaleur à l’heure où je vous parle, restaurer la paix et redonner le sourire à des gens soumis auparavant aux pires exactions, on est fier d’être Gabonais et fier d’être ministre de la Défense. On est fier de servir une communauté qui sait si bien faire rimer rigueur avec solidarité, exigence avec générosité.

Monsieur le Secrétaire Général

Messieurs les Chefs de Corps

Officiers….

Je voudrais moi aussi vous souhaiter tous mes vœux de santé, de bonheur et de Paix. Une très bonne année de courage et de sérénité, et ce d’autant plus qu’elle sera rude, car faite de rendez-vous cruciaux avec notre histoire et de combats contre nombre de défis. Je suis très heureux de les mener avec vous, dans le cadre des relations franches, cordiales et confiantes qui sont les nôtres.

A travers ces vœux, je veux vous dire merci pour l’action de nos forces de défense en faveur de notre pays, le Gabon, et de la stabilité et la paix en Afrique.

Merci pour la qualité de notre travail commun au service de nos armées.

Depuis quatre mois en effet, je suis à votre rencontre, et j’entends vos soupirs. Je me suis rendu compte par moi-même comment vous vivez votre métier au quotidien, comment vous remplissez votre mission, quels sont vos attentes et vos espoirs, mais aussi quels sont les risques auxquels vous êtes confrontés. Et quelles ont vos faiblesses dans l’exécution de votre noble métier…

 

Mesdames et Messieurs,

Le monde change, et il change vite.

Plusieurs défis sont devant nous: l’insécurité croissante, le déséquilibre grandissant entre le Nord et le Sud, la prolifération du terrorisme à grande échelle capable désormais de frapper au cœur de notre territoire, une menace militaire majeure qu’on ne peut ignorer. Notre territoire est plus menacé qu’il ne l’était. Ce contexte changeant d’un monde qui bouge nous impose d’adapter notre instrument de défense.

Il y a par ailleurs de fortes contraintes budgétaires : celles du pétrole dont le baril se vend à moins de 30 dollars et celles du ministère lui-même, avec des besoins en hommes et en crédits d'équipement sans cesse croissants. Si on y ajoute les besoins des autres ministères, on comprend bien que les contraintes sont fortes et que ces contraintes nous imposent plus de rigueur.

Dès lors, seules des réformes nous permettront des marges de manœuvre, pour maintenir la cohérence d’ensemble de nos capacités militaires, garantir les normes d’activité et d'entraînement, renforcer la capacité d’action des forces, continuer d’améliorer la condition du Soldat. Car, disait un Illustre Général, «  le moral du Soldat est dans sa gamelle ».

Ces réformes, je les mènerais pour vous, pour nos armées et pour le Gabon, et surtout je les mènerais avec vous.

Mais ces réformes, quelles sont-elles ?

D’abord, la gestion du ministère doit être améliorée, pour établir une gouvernance plus transparente et clarifier les rôles, pour plus d’efficacité.

L’interarmisation ensuite doit faire un pas décisif, un saut qualitatif parce qu’il y a de plus en plus d’opérations intégrées terre-air-mer et que beaucoup de fonctions communes sont par nature interarmées. Et donc, pour favoriser ces synergies, il faudra rechercher - chaque fois que c’est possible - les mêmes procédures, les mêmes standards et les mêmes matériels.

Nous avons besoin d’interarmisation, de mutualisation des soutiens, mais aussi d’externalisation là où elle rend le système plus efficace.

Je pense par exemple à une partie de l’infrastructure. Lorsque les infrastructures sont spécifiquement militaires ou nécessitent la protection du secret, elles doivent être suivies en interne. Dans le cas contraire, il n’y a aucune raison de ne pas externaliser comme le font toutes les collectivités publiques et toutes les entreprises.

Je pense aux restructurations territoriales : les emprises doivent être densifiées, dans un esprit interarmées, et le soutien global mutualisé quelle que soit la couleur de l’uniforme. Il y aurait seulement deux critères : préserver les capacités opérationnelles et améliorer les conditions de vie des Soldats. Le test pourrait être MINKEBE.

Je pense aux casernes comme « bassins de vie militaire », qui faciliteraient la vie des familles, la scolarité des enfants et l’activité professionnelle des conjoints, tout en permettant d’avoir un soutien et une administration générale à toutes les unités.

Monsieur le Secrétaire Général

Messieurs les Chefs de Corps

Officiers….

La volonté du Président de la République de maintenir l’effort de défense a été un signe fort de confiance ; c’est aussi pour nous tous une responsabilité.

Je m’y engage : cet effort sera accompli en donnant la priorité à nos capacités opérationnelles, en améliorant les conditions d’exercice du métier et en faisant progresser la condition du soldat. C’est ainsi que nous aboutirons à l’objectif que nous partageons tous : une armée bien équipée, dotée de matériels performants et adaptés à vos missions, des militaires bien formés et mieux payés, une défense toujours performante, opérationnelle et crédible. En somme, une armée en OR.

Je sais que vous avez déjà fait beaucoup. Mais je sais aussi que vos compétences, votre efficacité, votre détermination vous permettront de faire face aux défis humains, techniques et opérationnels d’aujourd’hui et de demain. Car l’une des vertus cardinales  des militaires, c’est leur capacité d’adaptation. Cette adaptation, vous saurez en être les acteurs.

Je pense à la condition militaire. Je veillerai à prendre en compte ce que me disent vos chefs et à rester à votre écoute. Le président de la République y a insisté, dans ses vœux aux armées.

Monsieur le Secrétaire Général

Messieurs les Chefs de Corps

Officiers….

En début d’année, la tradition est plutôt de prononcer des vœux. Mais de mon point de vue, ce sont des engagements que vous attendez de moi et non des vœux, même sincères. Et ces engagements, je compte bien les tenir, croyez-moi.

- Premier engagement : le maintien de l’effort de d’équipement, en dépit des graves difficultés financières liées à la crise du Pétrole. Cet engagement est celui du Président de la République, il est donc le mien. Dans tous les cas, les désirs du Chef suprême des Forces de Défense et de Sécurité sont pour nous des ordres. Nous le savons bien.

Pour ce faire, il nous faut donc rationaliser. C’est parce que nous ferons cet effort de rationalisation que nous serons en droit de demander à la Nation davantage de moyens nécessaires pour être en mesure d’exécuter les missions qu’on nous confie.

- Deuxième engagement : notre réactivité doit être renforcée. Cela impose notamment de posséder des vraies capacités de commandement et de renseignement.

- Troisième engagement : la capacité d’action. Notre pays doit rester une puissance régionale crédible, avec un appareil militaire possédant l’ensemble des grandes capacités.

- Quatrième engagement : Nous devons avoir le souci d’optimiser les capacités opérationnelles de nos armées.

René Pleven disait: « le gouvernement ne se dissimule pas les difficultés techniques et psychologiques... Mais tous les obstacles peuvent être surmontés avec de la volonté, de l’imagination et de la foi ».

Cette volonté, cette imagination et cette foi, nous les avons au Ministère de la Défense ; ce n’est même pas une conviction personnelle, c’est une affirmation tirée du seul pragmatisme : il s’agit de prendre en compte les intérêts de notre pays et l’enjeu de la stabilité régionale. Quand on a des intérêts communs, on a besoin de les défendre en commun. Et nous avons à défendre une communauté de valeurs, un modèle de société.

Autour de nous, on définit le Gabon comme un espace de paix. C’est une conception que nous devons conforter. Et c’est tout le sens de notre déploiement dans le rétablissement et le maintien de la Paix en Afrique, chaque fois que cela est nécessaire. Le Gabon est une véritable « école de paix et de stabilité » dit-on.

Mais le Gabon ne pourra imposer ses vues que s’il  dispose des moyens militaires de les faire appliquer. Le poids du Gabon dépend aussi de son poids militaire, qui se mesure en capacités réelles. Et c’est votre exaltante mission.

Monsieur le Secrétaire Général

Messieurs les Chefs de Corps

Officiers….

Mais vous devez vous engager, vous-aussi

Vous engagez à faire régner et respecter l’ordre et la discipline dans vos rangs. Trop de cas d’indiscipline et de comportements déviants sont signalés au sein des forces de sécurité ces derniers temps :

  • Usage de stupéfiants
  • Braquages
  • Racket
  • Vol
  • Escroquerie
  • Abus sexuels
  • Désertions et j’en passe….

La Discipline reste la base de votre organisation.

Que les officiers s’engagent à encadrer la troupe. Celle-ci semble abandonnée à elle-même, libre de tous ces excès.

Engagez-vous à combattre le démon de l’ethnisation des corps, annonciateur de la fin de votre neutralité politique.

Engagez-vous pour une notation objective, correcte, uniforme et sans complaisance.

Engagez-vous pour des inspections rigoureuses et qui cessent d’être des simples voies de garage.

Engagez-vous pour le respect de votre uniforme, et afin que plus aucun soldat ne fréquente les débits de boisson en uniforme et en toute impunité.

Engagez-vous pour une Armée véritablement apolitique, épine dorsale d’une solide démocratie.

Engagez-vous pour une Armée toujours plus proche du citoyen, grâce au Service de Santé Militaire véritable pierre angulaire de notre politique de santé publique, et grâce au Génie Militaire qui doit prendre sa part dans la construction de la Route Gabonaise.

Engagez-vous à sanctionner sans état d’âmes. Mais toujours en toute équité.

Mesdames et Messieurs,

La retraite, comme la mort, est notre destination à tous. Nous allons donc tous faire l’effort de rester attentifs aux difficultés de nos frères d’armes qui nous y ont précédés.

Pour toutes ces actions, j’attends vos réflexions et vos suggestions.

Distingués invités

Mesdames et Messiers

Officiers….

Avant de conclure mon propos, je pense sincèrement aux femmes et aux hommes de la Défense qui, cette année, ont pu payer dans l’exercice de leur engagement ; à tous ceux qui ont souffert dans leur chair au service du Gabon. Je veux témoigner à leurs familles, à leurs amis, à leurs camarades, la reconnaissance et l’affection de l’ensemble de la communauté de la Défense.

Je vous souhaite, ainsi qu’à vos familles et à vos proches, une belle année 2016, et vous assure de mon attention, de ma confiance et de la reconnaissance du Chef Suprême des Forces de Défense et de Sécurité.

Je vous remercie.